La paroisse Saint-François-de-Laval, à Limoilou, a accueilli hier de nombreuses personnes qui souhaitaient vivre un moment de solidarité avec les chrétiens et chrétiennes persécutés dans le monde.
Pour cet événement diocésain, l’église Saint-Pascal-de-Maizerets a été illuminée en rouge. Une célébration eucharistique spéciale a été présidée par Mgr Marc Pelchat, évêque auxiliaire à Québec. Son homélie a été fort appréciée, nous la rendons disponible ci-bas.
Nous notons la présence des membres de l’Ordre équestre du Saint-Sépulcre de Jérusalem, dont la mission est notamment de soutenir les Catholiques vivant en Terre sainte.
Le Mercredi rouge est un événement dont l’objectif est de mettre en lumière la persécution et l’injustice subies par les chrétiens tout en prônant le respect et la tolérance entre personnes de religions différentes. L’objectif recherché est qu’un plus grand nombre de personnes se positionnent pour leur foi, et plus largement pour la liberté religieuse. Merci à l’organisme Aide à l’Église en Détresse (AED) pour cette initiative solidaire.
Crédit photo : Paroisse de Limoilou
Homélie du Mercredi Rouge (solidarité avec les chrétiens persécutés)
Par Mgr Marc Pelchat, évêque auxiliaire à Québec
Chers frères et sœurs,
Pour la première fois cette année, l’Église diocésaine de Québec a choisi de souligner le Mercredi Rouge en solidarité avec tous les chrétiens persécutés à travers le monde. Depuis quelques années, nous avons davantage pris conscience des atteintes à la liberté religieuse dont les manifestations les plus visibles sont les persécutions visant des croyants et les violences envers des minorités religieuses, musulmanes, chrétiennes, juives, bouddhistes, sikhs, bahaï, et bien d’autres.
Bien qu’il soit très difficile d’obtenir des chiffres précis, les recherches actuelles suggèrent que les deux tiers de la population mondiale vivent dans des pays où des violations des libertés religieuses se produisent sous une forme ou sous une autre. On note que parmi les populations touchées, les chrétiens semblent constituer le groupe majoritaire soumis à diverses formes d’intolérance qui, au fil du temps, se développent jusqu’à la discrimination et la persécution.
La liberté de religion ou de conviction est un bien précieux. C’est aussi un bien qui est menacé dans nos sociétés actuelles. Je cite à ce propos les paroles du pape François qui s’adressait aux participants d’une rencontre sur la liberté religieuse le 28 septembre 2015 :
« Dans un monde où diverses formes de tyrannie moderne tentent de supprimer la liberté religieuse, de la réduire à une sous-culture sans droit de cité dans la sphère publique, ou encore tentent d’utiliser la religion comme prétexte à la haine et à la brutalité, il est impérieux que les fidèles des diverses traditions religieuses unissent leurs voix pour appeler à la paix, à la tolérance, au respect de la dignité et à tous les droits d’autrui. »
Près de quatre milliards d’hommes et de femmes vivent dans les pays qui sont actuellement considérés comme subissant les violations les plus graves de la liberté religieuse (26 pays selon le Rapport 2021 de l’Aide à l’Église en détresse). Cela représente un peu plus de la moitié (51%) de la population mondiale. Presque la moitié de ces pays se trouvent en Afrique, où des groupes armés et des djihadistes ont connu un montée en puissance, dans la mouvance de l’organisation État islamique et d’Al-Quaïda. Mais d’autres régions, comme l’Asie continentale, ont connu des vagues de fond croissantes avec des restrictions religieuses imposées par des dictatures militaires ou des gouvernements autoritaires, ou infligées par des populations qui sont nourries de nationalisme ethnique.
Le point commun à toutes ces situations est l’impact sur les personnes plus vulnérables, en particulier les femmes et les filles qui appartiennent à la « mauvaise religion » et qui sont enlevées, parfois violées, soumises à l’esclavage ou mariées de force en devant changer de religion. Sans aller à ces extrêmes, de nombreux autres pays ont vu la situation empirer avec des cas de violations sévères, notamment au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Certains d’entre eux ont adopté des lois restrictives qui réduisent sérieusement les droits de certains groupes de croyants.
La liberté de religion ou de conviction fait partie des droits universels de la personne. Contrairement à ce que certains peuvent penser, la liberté religieuse n’a pas pour but de protéger les systèmes de croyance ou les religions en elles-mêmes. La liberté de religion ou de conviction veut plutôt protéger les êtres humains contre toute forme de coercition, d’intimidation ou de discrimination dans le vaste domaine des convictions et pratiques religieuses ou des croyances. La liberté de conscience et de religion est indispensable pour comprendre l’ensemble des droits humains en général.
Nous vivons dans une société où la liberté de conviction et de religion est généralement respectée. Dans les débats actuels sur la nature laïque de l’État moderne, la laïcité est devenue une caractéristique déterminante de la société moderne. Cependant, on voit que la notion de laïcité prend des significations très différentes dans le discours des uns et des autres. Dans ces débats, il importe de maintenir un espace public ouvert à la diversité religieuse et non religieuse au sein de notre population. On voit à l’occasion, même ici chez nous, que la laïcité peut incarner une vision du monde anti-religieuse au sein de nos institutions publiques. Au contraire, la laïcité devrait être au service du respect et de la liberté des personnes, tant en privé qu’en public. Nous avons une tâche difficile devant nous pour trouver un équilibre juste entre une laïcité ouverte et une laïcité restrictive ou fermée à l’expression religieuse.
Les exigences de la lutte pour contenir la diffusion du virus de la COVID-19 ont entraîné la restriction de certaines libertés fondamentales, y compris la liberté religieuse. Aucun événement de l’histoire moderne n’a autant affecté la population mondiale. Pouvons-nous parler d’atteintes à la liberté religieuse? Certainement pas d’une manière générale, mais peut-être en certains pays où la laïcité est plus agressive. On a pu observer parfois, même ici, une application disproportionnée des restrictions aux activités religieuses par rapport à des activités commerciales ou de loisirs. Mais grâce au dialogue, notamment par l’établissement d’une table de concertation interreligieuse, on a pu trouver avec l’État québécois des solutions équilibrées.
Dans une homélie d’avril 2016, le pape François, évoquant les persécutions violentes contre des chrétiens comme étant l’une des formes de l’intolérance religieuse, a aussi parlé de la « persécution polie, déguisée en culture, déguisée en modernité, déguisée en progrès ». C’est pourquoi il nous faut être vigilants sur les politiques et législations qui viennent amoindrir la liberté de religion ou supprimer l’objection de conscience. Il faut bien prêter attention aux interprétations radicales de la notion de laïcité de la part de nos gouvernements, dont le devoir est de respecter la liberté de conviction et de religion, dans toute sa diversité.
Mais ce soir, nous voulons surtout nous unir à tous ceux et toutes celles qui souffrent de l’intolérance, de la discrimination et de la persécution religieuses. Nous pouvons aussi nourrir notre espérance, car il y a des régions du monde où la situation s’est améliorée. Nous voyons aussi comment le pape François travaille sans relâche au dialogue inter-religieux, condition de la paix universelle et de la construction de l’unité humaine dans le respect des différences.
Ce soir, supplions le Seigneur de venir au secours de nos frères et sœurs dans la détresse.