(Article paru dans l’édition Janvier-Février 2021 de la revue Pastorale-Québec)
À l’invitation de la République d’Irak et de l’Église catholique locale, le pape François se rendra dans ce pays arabe du 5 au 8 mars prochain. Il est prévu qu’il s’arrêtera dans la capitale, Bagdad, qu’il passera par la plaine d’Ur (le coin de pays d’où est parti jadis Abraham), les villes d’Erbil et Mossoul et, passant par la plaine de Ninive, Quaraqosh. Vous l’avez déjà remarqué : les noms bibliques abondent sur ce parcours. Qui plus est, Mossoul, la 2e ville du pays, a été occupée par les hordes de l’État islamique de 2014 à 2017; sa population et celle de la contrée alentour ont été, pendant ces trois années, soumises à une dictature féroce.
Le pays entier se relève péniblement de l’invasion états-unienne en 2003 et de l’occupation militaire qui presque terminée, qui a vu combats et attentats de toutes sortes se multiplier depuis 15 ans. Loin d’être devenu un havre de liberté, comme le chantaient des politiciens d’Amérique, l’Irak voit maintenant s’affronter chiites, sunnites et Kurdes, en même temps que militants de plusieurs communautés; alors que l’Iran voisin cherche activement à mettre sous sa coupe ce pays arabe, à majorité chiite comme lui, créé artificiellement par le Traité de Versailles en 1919, au lendemain de la Première Guerre mondiale. Pour conclure la rétrospective historique, rappelons-nous seulement que saint Jean-Paul II avait farouchement dénoncé l’invasion de 2003, que le président Bush avait essayé de légitimer en évoquant des « armes des destruction massive », dont il est bien établi qu’elles n’ont jamais existé.
Tel est le bourbier dans lequel va s’aventurer le pape François début mars. On aura compris qu’il y va d’abord pour encourager les derniers chrétiens restés là-bas, alors que les premiers d’entre eux y vivaient il y a presque 2000 ans (donc six siècles avant l’arrivée des musulmans). Fidèle à son engagement de toujours, Jorge Mario Bergoglio y va aussi pour redynamiser le dialogue et l’harmonie entre chrétiens et musulmans. Il n’aura pas la tâche facile, car les appartenances confessionnelles ont été largement instrumentalisées pour nourrir les conflits. Nous pouvons au moins prier pour lui et pour tous les croyants de bonne volonté au cœur du monde arabe.
René Tessier