Le 28 janvier 1988, la Cour suprême du Canada rendait son célèbre jugement Morgentaler. Une décision qui faisait tomber les lois existantes entourant la pratique de l’avortement au pays. Depuis lors, aucune nouvelle législation n’a vu le jour pour baliser l’interruption volontaire de grossesse.
Plusieurs médias aborderont la question aujourd’hui (Le Devoir a déjà préparé un excellent dossier sur le sujet samedi), mais je vous suggère d’aller aux sources en cet anniversaire des plus tristes pour tous et ceux et celles pour qui l’enfant à naître est un être humain digne et entier.
Vous pouvez consulter le jugement dans son intégralité ici.
Je vous partage un extrait qui m’interpelle particulièrement (article 258):
Comme le fait observer le professeur Sumner, les deux approches traditionnelles de l’avortement, les approches dites « libérale » et « conservatrice », ne tiennent pas compte de la nature essentiellement évolutive de la grossesse. Une conception du foetus fondée sur le stade de développement, d’autre part, appuie une approche permissive de l’avortement dans les premiers stades de la grossesse et une approche restrictive dans les derniers stades. Dans les premiers stades, l’autonomie de la femme serait absolue; sa décision, prise en consultation avec son médecin, de ne pas mener le foetus à terme serait décisive. L’État n’aurait pas à connaître ses raisons. Ses raisons d’avoir un avortement pourraient toutefois, à bon droit, faire l’objet d’une investigation dans les derniers stades de sa grossesse, alors que l’intérêt supérieur qu’a l’État de protéger le foetus justifierait l’imposition de conditions. Quant au point précis du développement du foetus où l’intérêt qu’a l’État de le protéger devient « supérieur », je laisse le soin de le fixer au jugement éclairé du législateur, qui est en mesure de recevoir des avis à ce sujet de l’ensemble des disciplines pertinentes. Il me semble cependant que ce point pourrait se situer quelque part au cours du second trimestre. D’ailleurs, d’après le professeur Sumner (à la p. 159), une politique d’avortement en fonction de phases, avec une limite placée au cours du second trimestre, est déjà en vigueur aux États‑Unis, en Grande‑Bretagne, en France, en Italie, en Suède, en Union soviétique, en Chine, en Inde, au Japon et dans la plupart des pays de l’Europe de l’Est, le délai variant, selon les pays, du début à la fin du second trimestre (cf. Stephen L. Isaacs, « Reproductive Rights 1983: An International Survey » (1982‑83), 14 Columbia Human Rights Law Rev. 311, en ce qui concerne la France et l’Italie).
25 ans se sont écoulés et nous n’avons toujours pas établi ce moment du développement de l’être humain où il devient plus important à protéger que l’autonomie et le choix de sa mère.
Pour les catholiques, ce moment est clair: dès la conception.
Pour la société canadienne, toute réponse serait meilleure que l’actuelle: la première sortie hors du corps de sa maman…
Dans notre contexte politique, il ne faut guère espérer de changements, mais prenons le temps aujourd’hui de remercier tous ceux et celles qui y travaillent avec coeur.
Indépendamment des lois en place, notre devoir de chrétiens et de chrétiennes est de soutenir tous les groupes et personnes venant en aide aux femmes qui envisagent un avortement. Légal ou non, le choix demeure le leur. Soutenues, encouragées et accompagnées, nul doute que plus de femmes feraient le choix de garder leur enfant.
Celles qui ne font pas ce choix doivent être aussi profondément aimées: 100 000 avortements par année au Canada, c’est 100 000 occasions de prendre dans nos bras et d’écouter une amie, une soeur, une collègue, une proche…